Á la veille de l’ouverture du conclave romain, ce conclave d’hommes, ce « demi
conclave », nous, soixante-douze femmes prises du milieu du monde, nous nous sommes
réunies ce jour en conclave.
Une telle initiative constitue une première absolue. Pourtant elle était à la fois prévisible,
inévitable et dans la droite ligne de notre vocation de baptisé-e-s.
Prévisible, car le feu couve sous la cendre. La situation faite aux femmes dans l’Église
catholique est non seulement injuste et contre-productive, mais elle est la cause de
l’ensemble des maux dont souffre l’Église : absence de sang neuf, asthénie, recul des
valeurs morales, méfiance envers l’autre, oubli de ses aspirations. Pourtant, les femmes
sont présentes, actives et aimées dans l’Église. Ce sont elles, les petites mains qui font
tourner la maison. Mais quand leur donne-t-on la parole?
Inévitable, cette initiative l’est aussi parce qu’elle libère la parole, aujourd’hui en
souffrance dans notre Église. Or, parler, c’est vivre. Nous souhaitons que notre Église
vive de sa parole retrouvée, une parole de femmes et d’hommes libres et solidaires de
tous.
Enfin, cette initiative est dans la droite ligne de la vocation de l’Église, peuple de
Dieu, Corps du Christ, car c’est du coeur des baptisé-e-s que jaillit l’Esprit qui permet de
gouverner, enseigner et sanctifier tous en tout temps.
Nous, les soixante douze, nous avons prié et nous nous sommes écoutées. La grande
qualité des contributions a révélé à beaucoup combien la parole des femmes pouvait être
forte. Psychologues, aumôniers en hôpitaux psychiatriques, en prison, en soins palliatifs,
catéchistes, biblistes, historiennes, théologiennes, religieuses insérées dans des quartiers
de grande précarité, toutes ont, d’une manière ou d’une autre, souligné les joies et les
blessures de notre société, la complexité du monde moderne, le bonheur de croire, et
l’interdépendance qui existe entre tous.
Nous voulons une Église de la bienveillance, ouverte aux Églises particulières, aux
cultures et aux religions, une Église mixte et paritaire qui accueille au lieu d’exclure, qui
ne fasse pas des sacrements une sanction, qui écoute ses fidèles avant de décréter, qui les
nourrisse par la parole au lieu de les infantiliser. On ne construit rien dans la
condamnation et la peur. Unissons donc nos forces pour créer dans la joie l’Église de
demain.
Au terme de notre conclave, nous retenons quatre propositions :
-Que notre Église se dote d’un observatoire des pratiques de parité dans l’Église. Nous
demandons aux catholiques d’exercer leur vigilance sur les positions diplomatiques du
Vatican, à propos des femmes.
-Que les femmes, partout où elles le peuvent, avec les hommes qui le veulent, organisent
des cercles de silence autour des sièges des conférences épiscopales.
-Que des femmes deviennent diaconesses et cardinales.
-Enfin, parce que l’humour va plus loin que l’humour, nous souhaitons que les hommes d’Église ne portent plus de robe.
Le Comité de la Jupe