LA THÉOLOGIE FÉMINISTE DE LA LIBÉRATION A TRAVERS LE MONDE
ASIE: la moitié de la population mondiale vit en Asie. Les chrétiennes et les chrétiens y constituent une minorité de 2%. La réalité socio-culturelle est profondément imprégnée par l’hindouisme et par le bouddhisme. Les théologiennes et les théologiens de la libération affirment qu’il est essentiel d’intégrer dans leur théologie les valeurs de ces grandes religions, véritables « sources de critique permanente de tout ordre établi et orientation vers l’édification d’une société vraiment humaine » (1).
L’Indonésienne Henriette Marianne Katoppo, théologienne, affirme que les femmes, en plus de rencontrer des obstacles majeurs S leur libération (prostitution, sous-alimentation des filles le père et les frères ayant priorité -, usage de la dot, etc.); doivent affronter le « chauvinisme mâle » de leur Eglise.
Toutefois, des signes d’espérance pointent à l’horizon. Je songe notamment à la revue In God’s Image, éditée par la révérende Sun Ai Park qui fournit régulièrement des analyses féministes de la condition des femmes dans la société et dans l’Église en Asie.
La 2e Conférence de la théologie asiatique de l’Association des théologiens du Tiers-Monde (Hong-Kong, août 1984) a réuni pour la première fois 42% de participantes. Le travail de la secrétaire de cette association, Virginia Fabella (Philippines) et d’autres personnes actives dans l’association n’est pas étranger à cette réussite.
AMÉRIQUE LATINE: cette partie du monde est le creuset de la théologie de la libération. Il faut reconnaître toutefois, qu1 au départ, la place des femmes n’y a pas été évidente. Cependant, la rencontre de Sao Paulo (fév.-mars 1980) a été l’occasion d’affirmer que « Marie, la mère de Jésus est avant tout la femme pauvre, libre et engagée du Magnificat, et la croyante fidèle qui a accompagné son Fils jusqu’à la Pâque ». De plus, au sujet des ministères, il a été affirmé que « la discrimination que subissent les femmes dans l’Église ne se justifie ni bibliquement, ni théologiquement, ni pastoralement ».
Des femmes commencent à se regrouper, à se faire entendre. En novembre 1983, une quinzaine de femmes chiliennes se réunissaient S Santiago pour explorer la possibilité de faire une théologie des femmes et pour les femmes, basée sur leurs expériences. Elles souhaitent multiplier ces rencontres.
AFRIQUE »: la rencontre d’Accra (Ghana, 1977) des théologiens du Tiers-Monde a permis d’affirmer l’importance de lutter contre le sexisme. Reconnaissant le rôle actif des femmes dans l’Eglise et dans le combat pour la libération, ils ont dit leur volonté de « prendre au sérieux le rôle des femmes dans l’Eglise à égalité pour la production théologique ». S’il reste beaucoup à faire, il faut avouer que les femmes africaines aux prises avec la famine, l’apartheid, etc., ont comme première priorité d’assurer la survie des leurs.
CONCLUSIONS:
1) La théologie féministe de la libération est apparue tardivement dans le discours de la théologie de la libération comme tel. On a mis du temps à reconnaître le sexisme comme un des modes d’oppression de l’humanité au même titre que le racisme et le classisme.
2) La théologie féministe de la libération a été inspirée au niveau méthodologique par la théologie de la libération d’origine latino-américaine. Elle a connu son principal essor en Amérique du Nord où la théorie et la pratique féministes ont été particulièrement florissantes. Maintenant, nous voyons les théologiennes féministes nord-américaines devenir des références importantes pour les femmes du Tiers-Monde.
3) Nous pouvons souhaiter que s’accentuent les échanges entre les femmes du monde occidental et celles du Tiers-Monde pour que nos théologies se questionnent et s’enrichissent mutuellement de nos pratiques de libération.
Marie-Andrée ROY
groupe Vasthi Montréal
(1) Dieu en Asie, Paris, Karthala, 1982, page 178.