Devenir Christa à la manière de Marie de Magdala
Marie de Magdala est cette femme qui, au matin de Pâques, a occupé une place ben particulière dans la naissance de la foi, et cela malgré la forte empreinte masculine de la société juive de l’époque. En relation avec ce que nous suggèrent es récits évangéliques —si succincts, soient-ils — écoutons cette femme disciple et apôtre nous raconter comment la Christa est intervenue dans sa propre vie.
Ma vie intérieure autant que mon engagement dans la communauté pascale, a emprunté un modèle christique. Avec d’autres soeurs disciples, j’ai suivi fidèlement on maître bien-aimé dans ses pérégrinations à travers la Galilée en m’efforçant de conformer ma vie à la sienne, notamment dans le service (Le 8,1-3). Montée avec lui à Jérusalem (Me 15,41), j’ai assisté, dans l’angoisse et la douleur, aux péripéties de la semaine sainte : l’arrestation, les comparutions successives devant Anne et Caïphe, l’agonie, la mort au Golgotha et la mise au tombeau (Mt 27, 55-56.61 et parallèles).
Paradoxalement, mes compagnes et moi avons devancé les hommes disciples, on seulement parce que nous étions les témoins privilégiés de la mort en croix de Jésus et de son ensevelissement, mais parce que nous étions les premières à recevoir l’annonce de la résurrection par des messagers divins; les premières à reconnaître le Christ ressuscité et à divulguer cette nouvelle au groupe des « Onze et- les-autres » (Le 24, 9). À notre témoignage,ils ont refusé d’adhérer, qualifiant nos propos de « racontars » (v. 11). C’est nous —et le Christ à coup sûr — dans notre sincérité brûlante, qu’ils offensaient. Incrédulité et « dureté de coeur » que le Maître e tardera pas à leur reprocher (Me 16,14).
Inaccessible, pour moi, jusqu’à ma rencontre personnelle avec le Ressuscité, la foi pascale m’a ouvert une nouvelle piste en me conduisant à la découverte de mon identité théologique d’imago Christi. Croyez-moi, cette naissance d’en haut ne s’est as faite sans la douleur (Jn 20, 10-18). D’abord fixée sur l’ancienne façon de vivre on rapport au Nazaréen d’avant Pâques, j’ai été invitée à la dépasser pour reconnaître le Christ en la personne du jardinier — ce qui n’a pu se réaliser que sur un appel du « coeur ».
Dès que le Seigneur ressuscité m’a interpellé par mon prénom, je me suis sentie atteinte en mon centre. De l’amante éplorée, me voilà transformée en disciple ranimée dans ma foi chancelante, et je m’écrie en hébreu : « Rabbouni », c’est-à-dire « maître » (v. 16). Qu’il était doux de voir cet éclat lumineux dans ses yeux scintillant tout comme la réminiscence d’une enfance retrouvée qui rejaillit avec l’espoir du futur à l’horizon. Et ce sourire sur son visage n’était-il pas la confirmation que ce que j’y voyais était bel et bien réel et que ses yeux aussi me voyaient.
M’agrippant un instant à celui que j’avais tant cherché, je n’ai pas remarqué le changement radical qui s’était opéré en lui. Tendrement, le Maître m’a expliqué que sa montée vers le Père nécessitait un nouveau mode de relations entre lui et les « siens » auxquels j’appartenais. Et pour le signifier, il m’a confié la charge d’annoncer à mes « frères » qu’il était Vivant, c’est-à-dire présent dans son corps intime. Forte de ce message, j’ai inauguré aussitôt la diffusion de l’Évangile comme l’apôtre des Apôtres au sein des communautés chrétiennes ».
Cet itinéraire de Marie de Magdala est — ou devrait être — celui de chacune de nous. Comme elle, nous sommes porteuses de l’image du Christ par notre participation à sa vie, à sa mort et à sa résurrection jusqu’à devenir Christa.