Célébration des mères

Célébration des mères

Le travail collectif d’examen, de déconstruction et de reconstruction du concept de la maternité a commencé, dans le groupe Bonne Nouv’ailes, par des échanges remplis d’émotion, par une expérience d’ordre symbolique, plutôt qu’analytique. Cette expérience nous a amenées à proposer, comme premier pas de la démarche, de vivre une célébration : la célébration de nos mères !

Ouverture

Les femmes de Vasthi, de Myriam, de Houlda et de Bonne Nouv’ailes sont dans une première pièce éclairée par une lumière tamisée.

Prière d’ouverture :

Dieue étemelle,

C’est comme fille de ma mère que je te prie ce soir,

J’appelle dans mon coeur et dans ma mémoire l’auteure de mes jours,

Celle qui fut la sécurité de ma jeunesse et mon refuge dès la naissance, Celle qui fut aussi parfois l’objet de mes colères, Celle qui fut mon guide et mon adversaire.

La femme de mon père, la mère de sa fille, la fille de son père, je cherche

la femme que fut ma mère,

Pour lui pardonner ses erreurs,

Pour célébrer sa féminité,

Pour la remercier de ce que je suis aujourd’hui.

Je veux apprendre d’elle pour m’en détacher,

Je veux la prolonger et je veux m’accomplir.

Dieue éternelle, aide-moi à guérir l’enfant qui souffre en moi, et éclaire la femme d’aujourd’hui qui cherche.

Nous passons, une à une, dans la pièce voisine. La prêtresse nous accueille en enveloppant nos épaules d’une écharpe de soie blanche et en disant : « Viens et reconnais ton héritage maternel ».

La lumière vacillante des chandelles blanches disposées ça et là éclaire la pièce remplie de la chaleur de l’été, puis les belles paroles, riches de sens, de la chanson Et je chanterai pour elle, de Sylvie Tremblay, se font entendre :

Quand elles ne seront plus

Au jardin des lilas

Les dames aux cheveux blancs

Quand elles ne seront plus

Marguerites et pivoines

Alors je pleurerai

 

Et mes larmes auront

La douceur des baisers

Qu’enfant elles me donnèrent

 

La douceur des baisers

Car elles ne voudraient pas

Le chagrin que j’aurai

 

Et je danserai pour elles

Et je danserai pour elles

Et je chanterai quand même

 

À mon tour, quand j’aurai

La douceur de l’été

Pour unique caresse

 

À mon tour .quand la rose

Et l’épine envolées

Me feront plus légère

 

Alors pour un baiser

Souvenir adoré

Ferai une prière

En guise de baiser

Souvenir adoré

 

Et je chanterai comme elles

Et je danserai comme elles

Et je chanterai quand même

9

Plus tard, quand tu viendras

Au jardin des lilas

Pour une ancienne belle

 

Porter dans un baiser

Ta jeunesse en rosée

Sur son épaule tiède

 

Alors que ce baiser

De neige et de rosée

Soit doux hydromel

Alors que ce baiser

 

De neige et de rosée

Et tu danseras comme elles

Et tu chanteras comme elles

Et tu danseras pour moi

Et tu chanteras

 

Je chanterai pour elle, Sylvie Tremblay, CD 6402-71067-2, Audiograms.

Lectures*

Proclamation par l’animatrice :

Mères, nos mères, nous vous appelons. Comme cette écharpe de soie qui nous enveloppe et nous caresse doucement le visage et les épaules, venez caresser et toucher notre ecclésia. Trop souvent vous êtes effacées, oubliées, occultées. Soyez avec nous !

Après chaque lecture, on répond : « Mères, soyez avec nous ».

1ère lectrice :

Nous affirmons qu’il existe une généalogie de femmes. Généalogie de femmes dans notre famille : après tout nous avons une mère, une grand-mère, une arrière grand-mère et des filles. Cette généalogie de femmes, étant donné que nous sommes exilées dans la famille du père mari, nous l’oublions un peu trop ; nous sommes amenées à la contester.

Essayons de nous situer pour conquérir et garder notre identité dans cette généalogie féminine.

Toutes :

« Mères, soyez avec nous »

2ième lectrice :

La colère gronde dans nos coeurs. Nous ne voulons plus de la domination des pères. Le père interdit le corps-à-corps avec la mère. Ce qui apparaît dans les faits les plus quotidiens, c’est que notre société et notre culture fonctionnent originairement sur un matricide.

Toutes :

« Mères, soyez avec nous ».

* Ces lectures sont inspirées de textes de Luce Irigaray.

3ième lectrice :

Nous avons à trouver, retrouver, inventer, découvrir les paroles qui disent le rapport à la fois le plus archaïque et le plus actuel au corps de la mère, à notre corps. Nous avons à trouver les phrases qui traduisent le lien entre son corps, le nôtre, celui de nos filles. Nous avons à inventer un langage qui ne se substitue pas au corps-à-corps, ainsi que le fait la langue paternelle. Nous avons à trouver des paroles qui ne barrent pas le corporel mais qui parlent corporel.

Toutes :

« Mères, soyez avec nous ».

4ième lectrice :

Nous sommes toujours mères dès lors que nous sommes femmes. Nous mettons au monde autre chose que des enfants : de l’amour, du désir, du langage, de l’art, du social, du politique, du religieux et encore.

Mais cette création, cette procréation, nous a séculairement été interdite et pour ne pas être complices du meurtre de la mère, il faut que nous nous réappropriions cette dimension maternelle qui nous appartient, en tant que femme.

Toutes :

« Mères, soyez avec nous ».

Échange

Animatrice :

La relation mère-fille est préalablement une relation d’émotion et de sentiments plus qu’une relation rationnelle. Avant d’examiner, de déconstruire et de rebâtir notre discours sur la maternité, il serait bon de reconnaître notre héritage maternel. Chacune est donc invitée à raconter, de façon spontanée, ce qui lui vient à l’esprit quand elle pense à sa mère. Ce moment nous permettra de nous exprimer au gré de notre coeur et de nos souvenirs. Si certaines d’entre nous préfèrent garder le silence, qu’elles se sentent bien à l’aise.

Nous reproduisons ici, quelques éléments de cet échange.

Se rappeler, dire, ramène à une nouvelle symbiose mère-fille, femme-fille. N’est-il pas naturel que nos pensées se tournent d’abord vers nos premiers souvenirs d’enfance ? La mère, sujet central dans la famille, autour de qui toute la vie et la chaleur du foyer s’animent. Enfant fille, il faut composer avec l’autorité paternelle, se débrouiller avec les privilèges trop souvent accordés aux garçons, et aussi, parfois, ressentir une complicité de la mère avec la colonie mâle du foyer.

Il y a celles dont le père a quitté le milieu familial et celles, aînées d’une famille nombreuse, dont l’enfance et l’adolescence furent prématurément investies de responsabilités journalières afin de décharger cette mère prisonnière de toutes sortes d’exigences familiales. Il y a celles pour qui vivre le quotidien avec sa mère fut une belle histoire d’échanges interpersonnels – pour ne pas dire d’amour – tout au long de leur vie de fille, de femme. Alliées, mère-fille, ensemble elles se sont supportées, épaulées dans tes temps difficiles tout comme elles ont ri aux éclats aux temps doux.

Au fil du temps, cette mère complice du masculin a trouvé dans sa fille, maintenant femme, une alliée, un refuge. Certaines ont eu le temps de se parler, d’autres pas, d’autres inscrivent cette résolution à leur « agenda ».

Toutes nous avons de notre mère une mémoire unique – une sorte de connivence – entre elle et soi.

Musique douce.

Animatrice :

Nous avons, peut-être, à nous réconcilier plus profondément avec notre mère, avec ce qu’elle nous a légué, avec ce qui constitue l’essentiel de cet héritage maternel qui est le nôtre. Nous avons à reconnaître, à communier au matrimoine positif qu’elle nous a laissé. Nous avons à retrouver son influence amoureuse, bienveillante, bénéfique et lui en être reconnaissante.

Nous allons d’abord essayer de regarder, avec lucidité et compréhension, ce en quoi nous nous sommes senties brimées, puis doucement tenter d’accepter les aspects pénibles de son influence, jusqu’à lui pardonner les blessures causées contre sa volonté.

Cet héritage unique nous a « tricotées ». Il a orienté notre vie. Je vous invite à prendre un temps de silence pendant lequel chacune va essayer d’entrer dans ce lien vital qui l’unit à elle. Nous allons prendre le temps d’entrer dans ce qui fait l’essentiel du souvenir qu’elle nous laisse et qui nous a structurées. Nous allons nous exprimer à nous-mêmes ce qui alimente notre reconnaissance, notre vénération ; ce qui donne matière au pardon, au don par-delà la blessure.

Musique douce.

Symbolique

On distribue des verres d’eau.

Animatrice :

Soulignons par un geste symbolique notre démarche intérieure, notre désir profond de reconnaissance et de pardon.

Le geste consiste en ceci : boire deux petites gorgées d’eau de source, symbole de vie, de transparence.

On boit la première gorgée en disant : « Je te suis reconnaissante ».

On boit la deuxième gorgée en disant : « Je te pardonne ».

Ce geste symbolique de l’eau remue le souvenir de cette relation mère-fille qui a fait les femmes que nous sommes, qui à leur tour font celles de demain, puis celles d’après demain.

Bonne Nouv’ailes

Rédaction, Hélène Saint-Jacques