Un parcours initiatique
Louise Garnier, Phoebé
Muriel Barbery est l’autrice d’un roman à succès, L’élégance du hérisson, paru en 2006, qui a obtenu de nombreux prix (dont le Prix des libraires 2007)1.
Madame Barbery quitte son poste de professeur de philosophie et vient vivre durant une année, à Kyoto, avec son mari Stéphane Barbery. L’inspiration du roman Une rose seule lui vient de cette expérience en sol japonais. Elle influence grandement la couleur et le rythme de l’écriture. La grâce associée au Japon, on la retrouve tout au long du roman. C’est, à travers les légendes traditionnelles japonaises évoquées et à l’aide d’un style emprunté aux haïkus, que l’autrice nous offre ce roman dont le récit se déroule à Kyoto.
L’héroïne, Rose, est une botaniste, dans la quarantaine qui a grandi en France auprès de sa mère dépressive, Maud, qui a de toute évidence fermé les portes du passé, elle se suicidera d’ailleurs. Sa grand-mère, Paule, partage aussi leur quotidien et fait de son mieux pour apporter un peu de gaieté à sa petite-fille. Pourtant Rose est devenue une femme désabusée, en colère, sans appétit apparent de vivre.
Dans les premières pages du livre, nous apprenons en même temps l’existence d’un père japonais, marchand d’art contemporain. Ce père inconnu est décédé et a laissé une lettre pour sa fille chez un notaire à Kyoto.
Accueillie à Kyoto dans la demeure de son père, Rose est déstabilisée et appréhende de découvrir soudainement une enfance et un passé qui lui ont été volés. Dans un premier temps, Rose n’est que colère et amertume, frustrée d’être contrainte aux volontés d’un père défunt.
Mais Kyoto l’apprivoise et, chaque jour, guidée par Paul, l’assistant de son père d’origine belge, elle vit au rythme japonais. Avant de découvrir son testament ainsi que la lettre posthume qu’il lui a laissée, elle doit se rendre dans des lieux choisis par lui.
Le parcours initiatique suggéré est jalonné de temples, de jardins et de nombreux lieux envoûtants dont la beauté nous est décrite avec ferveur. Ce chemin, vers un mieux-être, permet de libérer toute la colère qui est en elle, sa dureté, son chagrin et sa rancœur. Chemin faisant, elle est révélée à elle-même, s’épanouit à travers des émotions et des sensations nouvelles.
« C’est ton âme japonaise qui possède le pouvoir de transformer le désenchantement et l’enfer en champ de fleurs », lui a prédit son père. Sa carapace se fissure et bientôt, on sent poindre sa fragilité. Guidée par l’assistant de son père, Paul, expatrié belge au cœur meurtri, elle entre doucement en connivence avec son être profond. Paul sera aussi un guide sur le chemin du pardon et de la guérison.
Dans une prose truffée de références au paysage, au quotidien et à la spiritualité japonaise, ce joli roman n’a pas su nous atteindre de façon exceptionnelle. En fin de compte, cette histoire de quête d’identité, d’amour et de renaissance en sol nippon nous apparaît surtout comme un pèlerinage de la part de l’autrice.
En elle demeurent les effluves, les images, les expériences sensorielles perçues jadis à Kyoto et dont elle rêve sans doute encore. Ce roman est donc à notre avis, un prétexte pour revisiter ce temps de sa vie et nous le partager.
1 Une rose seule, Muriel BARBERY, Actes Sud, 2020, 157 pages.