ESTHER BLONDIN
1809-1890
Une victime du silence imposé aux femmes par te pouvoir patriarcal clérical Une femme d’audace qui ouvre à d’autres femmes le chemin d’une militance téméraire et subversive: analphabète, elle fonde une communauté enseignante.
– à 20 ans, elle apprend à lire tout en étant domestique chez les C.N.D.
– à 22 ans, elle entre pensionnaire au milieu de jeunes de 12-15 ans
– à 24 ans, elle quitte Terrebonne pour aller enseigner aux filles du village de Vaudreuil
– à 30 ans, elle devient directrice de l’Académie et s’adjoint des collaboratrices choisies parmi ses anciennes élèves
– à 36 ans, minée par la maladie et l’épuisement et convaincue des limites évidentes d’un effort isolé, elle forme le projet de fonder une communauté religieuse enseignante dans la perspective de garantir l’instruction et l’éducation religieuse aux enfants pauvres des deux sexes dans les campagnes
– à 39 ans, elle met son projet en marche
– à 41 ans, avec quatre autres femmes, elle reçoit de Mgr Bourget le mandement d’institution des Filles de Sainte-Anne pour l’éducation religieuse des enfants pauvres de l’un et de l’autre sexe, et prononce les voeux de vie religieuse.
Une femme à l’action prophétique mise à l’ombre et réduite au silence par le patriarcat clérical
– Dès les débuts, la fondation est portée au crédit de Mgr Bourget.
– Aussitôt les voeux prononcés, Mgr Bourget, de sa propre autorité, désigne à la direction de l’Académie des jeunes femmes dans la vingtaine et maintient Esther Blondin dans les rangs.
– Dès 1851, Mgr Bourget ampute la jeune congrégation du but principal pour lequel elle a été fondée en limitant le droit d’enseigner dans les classes mixtes et, par conséquent, la possibilité pour les religieuses d’enseigner dans les écoles publiques. Ce qu’Esther Blondin conteste par écrit auprès de l’évêque dans une lettre datée du 15 juillet 1851.
– Transplantée avec quelques soeurs à St-Jacques-de-Montcalm, l’aumônier Louis Maréchal dénigre la fondatrice aux yeux de Mgr Bourget et des religieuses. Esther résiste aux intrigues du chapelain et réclame auprès de son évêque les droits des religieuses dans la régie interne de la communauté.
Le jeune abbé réussit à obtenir de Mgr Bourget qu’il démette Esther Blondin de ses fonctions et à la faire réduire au silence le plus complet pour tout ce qui concerne les orientations de la communauté. Esther signalera à Mgr Bourget l’illégalité de son intervention qui la soustrait désormais de l’éligibilité à divers postes.
Une femme dépossédée par le pouvoir clérical
Le décret romain de louange de mars 1863 et le décret d’approbation de mai 1883 consacre la fondation de la congrégation à St-Jacques-de-Montcalm au lieu de Vaudreuil. À la fondatrice qui fait remarquer l’erreur, on signifie de se taire et de s’asseoir. Esther mourra sans que Rome ait corrigé cette erreur.
Une femme soumise au doute clérical jusque dans sa tombe
Durant les premières étapes du processus romain de canonisation, Rome exigea des études fouillées pour établir hors de tout doute l’équilibre psychique de cette femme… et cela à cause d’un moment de délire provoqué par la fièvre finale qui l’emportera, auquel fut mêlé le nom de l’abbé Louis Maréchal. Pourtant avant de mourir, Esther avait expressément fait venir cet abbé pour lui exprimer son pardon.
Nous demandons la proclamation de sa sainteté par notre Ecclésia de femmes
pour que soit magnifié ce qu’elle a fait en tant que femme pour des générations de femmes de chez nous et avec des générations de femmes de chez nous.
parce qu’elle a toujours maintenu sa parole libre devant toute autorité ne se soumettant jamais servilement
parce qu’elle devient pour nous une inspiration à prendre la parole librement quel que soit le prix à payer
pour que justice et gloire lui soient rendues d’abord et avant tous par les voix d’un Collectif de femmes du Québec.
Réjeanne Martin pour le groupe Vasthi