Lectures féministes

Liminaire

C’est une pratique courante d’offrir aux lectrices de la revue des recensions d’ouvrages qui ont retenu l’attention d’une membre de la collective. La période pandémique fut une occasion pour certaines d’accorder plus de temps à la lecture pour découvrir et se nourrir d’ouvrages féministes porteurs de vie. Faire circuler ce qui nourrit la réflexion et l’action féministe s’avère un besoin vital dans ce temps postpandémique où le patriarcat pèse sur chacune d’entre nous toujours aussi fort. Voire même plus.

C’est dans cet esprit que les lectures féministes que nous partageons avec vous font une large place à l’ouvrage de Denise Couture Spiritualités féministes — Pour un temps de transformation des relations (PUM, 2021).

Au-delà de l’analyse et de leur point de vue sur l’ouvrage, cinq femmes nous communiquent les divers effets provoqués par sa lecture. Selon Anne Létourneau : « Ce livre donne de l’énergie dans un contexte particulièrement difficile au Québec comme ailleurs. » Johanne Jutras nous dit avoir eu beaucoup de plaisir et jubilé. De son côté, Marie-Andrée Roy affirme que la lecture de Spiritualités féministes « […] nourrit tant la colère que l’espérance, des ingrédients essentiels pour parvenir à la transformation des relations ! » Monique Hamelin écrit : « Denise Couture nous permet de faire des liens entre nos expériences et nos réflexions éparses faites au fil des années. » Ces réactions ne sont pas étrangères au fait que, comme le rapporte Christine Lemaire : « La théologienne [Denise Couture] définit la spiritualité comme un élan de vie. »

N’est-ce pas de celui-ci que peut jaillir tout travail de création ? Les femmes ont été créatrices de tout temps, mais non pas toujours eu cette reconnaissance. J’écris au passé, pourtant, encore aujourd’hui, les créations des femmes tardent à être mises sur le même pied d’égalité que celles des hommes.

Dans la présentation de son ouvrage que nous lui avons demandé, l’autrice de Spiritualités féministes, Denise Couture, écrit « […] j’ai remarqué que les hommes lisent très peu ou pas les théologiennes. »
N’en est-il pas ainsi pour l’ensemble de la littérature produite par des femmes, peu importe le sujet sur lequel elles écrivent ? La journaliste Nathalie Collard 1, faisait part d’une recherche de Lori Saint-Martin, qui s’est intéressée à la place occupée par les livres écrits par des femmes dans six journaux quotidiens en Europe et au Québec. Elle relevait que les livres écrits par des hommes occupaient beaucoup plus de place que ceux des femmes. Ce phénomène de sous-représentation était aussi observable dans l’attribution de prix littéraires et dans les cours de littératures.

Nous sommes encore et toujours dans une époque durant laquelle les boys clubs s’épanouissent aux dépens de l’élan vital des femmes. Lire des oeuvres féministes, c’est une invitation à dénoncer ce phénomène. Ce que fait Martine Delvaux dans l’ouvrage Le boys club recensé par Pierrette Daviau. Dans des groupes fort différents, comme les communautés nouvelles et dans l’Église, des élans de vies sont brisés, mais de leur côté des théologiennes et théologiens travaillent à favoriser l’égalité femmes-hommes. Les ouvrages recensés par Marie Bouclin, Pierrette Daviau et Nathalie Tremblay en témoignent.

Les créations littéraires des femmes témoignent de leurs recherches pour retrouver et nourrir l’élan de vie. Que ce soit au Japon, à travers un roman recensé par Louise Garnier ou à travers un dialogue entre les mots et les images que nous invite à découvrir Monique Hamelin. Retrouver l’élan de vie, c’est aussi l’affaire de Blanche de peur comme en témoignent ses confidences, à travers la création que nous propose Martine Lacroix.
S’ajoute à ces lectures féministes une bibliographie sur Marie de Nazareth, qui donne suite aux textes présentés dans le numéro 153 du printemps 2020. Un texte d’Anne-Marie Richard rend hommage aux 40 ans du réseau Femmes et Ministères. Bon anniversaire à nos alliées dans la lutte pour l’égalité entre les femmes et les hommes dans l’Église !

À vous bonne lecture et bon élan !

Johanne Philipps pour le comité de rédaction

 

1 Nathalie COLLARD. « Prend-on la littérature des femmes au sérieux ? », La Presse, le 8 mars 2016.
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