L’EKKLÈSIA À QUATRE VOIX : LES EXPOSÉS
Depuis quelques années, L’autre Parole s’identifie explicitement comme étant une « ekklèsia des femmes ». Le vocable provient du mouvement féministe et chrétien aux États-Unis et traduit, de l’anglais, les expressions « Womenchurch »ou « ekklèsia of women ». Ekklèsia, mot grec du Nouveau Testament, signifie Église. Nous l’avons retenu dans la traduction française afin de rappeler le mode d’être des premières communautés de partage qui se déployaient dans la diversité, avant la hiérarchisation des rôles et avant les contrôles des pères qui furent par la suite institutionnalisés. À partir de l’expérience de L’autre Parole, nous avons compris l’ekklèsia des femmes comme une communauté qui vit, construit et célèbre une foi féministe et chrétienne, entre femmes, sans attendre des transformations objectives d’une Église institution qui considère, encore, les femmes comme des mineures dans le domaine du sacré. L’ekklèsia des femmes dit un élan d’imagination et fait naître à ce que nous pouvons devenir.
À l’occasion de son vingtième anniversaire, L’autre Parole a ouvert son colloque annuel aux groupes et aux compagnes solidaires d’une pratique féministe et chrétienne. Le projet consiste à penser et à vivre l’ekklèsia des femmes dans sa diversité, comme identité politique encore à définir ensemble. Les quatre textes qui suivent résument les conférences données au colloque lors des plénières et présentent le concept d’ekklèsia des femmes sous différents aspects. Denise Couture montre l’apparition du concept dans l’oeuvre de Rosemary Radford Ruether en portant attention aux questions des années 1970 qui ont précédé et préparé son emploi généralisé en théologie féministe américaine. Louise Melançon présente révolution de la réflexion, de 1983 à 1994, d’une des auteures les plus percutantes sur le sujet, Elizabeth Schûssler Fiorenza. Au plan de la pratique, Marie-Andrée Roy demande si, au Québec, on peut parler d’ekklèsia des femmes et Monique Dumais élargit cette description en présentant un début de répertoire des pratiques en cours au niveau national et international.
Nous faisons l’hypothèse qu’une réflexion sur le concept et la pratique de l’ekklèsia des femmes peut nous aider à comprendre ce que nous sommes devenues et quels nouveaux défis de solidarité se posent au mouvement québécois du féminisme chrétien. Si l’expression provient du féminisme chrétien aux États-Unis, quel sens peut-il prendre au Québec ? Construirons-nous un autre concept identitaire comme nous avons construit Dieue, une féminisation du divin, unique et spécifique en son émergence en contexte québécois ?