LES ENQUÊTES DE THOMAS ET CHARLOTTE PITT
Monique Hamelin, Vasth
Pour la période estivale, que ce soit sous la pluie ou sous le soleil, au bord du lac ou à Balconville, il n’y a rien de mieux qu’un bon vieux polar avec des personnages que l’on a envie de retrouver au fil du temps. À cet égard, la série d’enquêtes de Thomas et Charlotte Pitt pourrait vous combler.
Quelque 25 titres vous attendent ! L’action se déroule dans les années 1880 et 1890. Si certains sont plus intéressants que d’autres, ceux que j’ai lus ont tous un petit goût de « Revenez-y ! » Anarchistes, républicains, royalistes, antisémites, homosexuels, gens de pouvoir, gens du peuple, les destins des uns et des autres s’y croisent selon les enquêtes.
Née à Londres en 1938, Anne Perry vit aujourd’hui en Écosse. Sa vie est un roman en soi. Son enfance tumultueuse lui valut une condamnation pour le meurtre de la mère de sa grande amie de l’époque ! Un film a été tiré de cette histoire : Heavenly Creatures (Créatures célestes en version française) de Peter Jackson. Kate Winslet s’y fit connaître, c’était en 1994. Le film vaut le détour.
Perry aurait commencé à écrire vers la fin des années cinquante. Par ailleurs, ce n’est qu’à l’aube de la quarantaine – en 1979 – qu’elle est publiée pour la première fois et depuis, les titres s’accumulent tant dans la série des Thomas et Charlotte Pitt que dans les écrits sur William Monk ou sur Joseph et Matthew Reavley que je ne connais pas encore. La grande caractéristique de madame Perry, le roman historique qui fourmille de détails justes et qui nous fait découvrir les us et coutumes d’une autre époque.
Les Pitt sont mari et femme et ils ont deux enfants de moins de dix ans. Si Charlotte a épousé quelqu’un d’une classe inférieure, son Thomas est cependant un être hors de l’ordinaire, un mari sans doute exemplaire pour l’époque, un enquêteur non conformiste, qui se spécialise dans les crimes des gens des classes supérieures. Cette situation permet des sauts dans l’aristocratie et dans les classes subalternes de la société britannique.
La conspiration de Whitechapel1, nous présente un Thomas Pitt confronté à des dilemmes moraux. La fin justifie-t-elle tous les moyens ? Royalistes, républicains, défenseurs de la veuve et de l’orphelin, tous doivent y faire face. Le héros subira des revers de fortune et sa Charlotte est toujours prête à prendre la relève pour soutenir son homme. Et c’est sans parler de la bonne, Gracie et de l’adjoint de Thomas, Tellman, qui se prend d’affection et d’amour pour cette jeune femme de quatorze ans sa cadette.
Perry réussit à glisser des références sur le Canada, le soulèvement de Riel au Manitoba en 1869-1870, sans jamais nous faire sentir la leçon d’histoire. Les petits détails sur le quotidien des enquêteurs et de la vie des femmes captivent son lectorat. Son Thomas Pitt réfléchit sur les disparités sociales, la peine de mort, la difficulté de faire confiance aux pouvoirs judiciaire et policier pour les déchus de ce monde, les femmes qui n’ont d’autres choix que de se prostituer, la vie à deux, la solitude… Charlotte, tout comme un autre personnage important de ce roman, Juno Fetters, s’interrogent sur la place des femmes dans la société, les conventions qui régissent leur société et qui ne sont peut-être pas la meilleure réponse pour soutenir les femmes dans les joies et les drames de la vie.
La fin n’est pas à l’eau de rose, mais souvent comme la vie, un mélange de compromis. Bonne lecture !
1. PERRY, Anne. La conspiration de Whitechapel, France, Éditions 10/18, traduction française 2007, 395 p.