Ce numéro de L’autre Parole donne suite au précédent, le no 134, sur le thème du pardon. Depuis que nos réflexions ont débuté sur la question en 2011, il me semble qu’elle est plus présente dans la société. Parmi ces moments forts, il y a eu l’opéra Dead man walking présenté en mars 2013 à Montréal. Le point de départ est le récit vécu publié par sœur Helen Prejean. La dernière marche1 est le titre de cet ouvrage relatant tant son expérience de soutien auprès des personnes condamnées à mort et des associations de victimes d’actes criminels, que son militantisme pour l’abolition de la peine de mort. Pour sœur Prejean, personne ne doit être laissé sans avoir auprès de lui un visage aimant. L’adaptation cinématographique de ce récit avec Susan Sarandon dans le rôle de sœur Prejean est grandiose. Ce préambule me permet de vous donner à méditer les mots de la fin de ce livre :
Le pardon n’est jamais facile. Il faut prier chaque jour pour l’obtenir et lutter pour le conserver et remporter la victoire. (p. 300)
Demander, comme donner le pardon est une expérience exigeante et les textes du présent numéro le redisent. Linda Spear, prêtre et Marie Bouclin, évêque, deux nouvelles membres de la collective, nous proposent, « une relecture du pardon à partir du Testament Hébreux et du Jésus des Évangiles pour ensuite remettre l’épineuse question du pardon dans son contexte actuel, dans le cadre du sacrement de Réconciliation. » Elles rappellent à juste titre que le pardon de Jésus n’est pas sans condition et que quelquefois, il faut s’en remettre à Dieue.
Trois groupes de L’autre Parole présentent leurs réflexions. Les femmes de Bonne Nouv’ailes soulignent qu’il faut pardonner en notre qualité de sujette et que le processus n’est nullement linéaire. La rage et le désir de vengeance peuvent resurgir, il faut accepter ces aller-retour sans entrer dans une culpabilité qui n’a pas sa place, mais reconnaître que la vie est comme une spirale.
Le groupe Houlda pose deux questions : Peut-on tout pardonner? et Jusqu’où peut-on pardonner? Pour y répondre, les Houldiennes ont pris l’exemple du refus de l’admission des femmes au sacerdoce et elles ont mis en scène un échange à quatre voix. Si le sexisme, comme le racisme est un péché, elles invoquent aussi le pardon du Seigneur pour ces tenants de l’idéologie patriarcale qui ne sert que leur pouvoir.
Quant au groupe Vasthi, c’est l’Albertine de Michel Tremblay qui sert d’inspiration pour montrer la rage, l’amertume, l’espérance, le désespoir et l’abandon que vivent bien des femmes. Côté cour, citant des extraits de la pièce de l’auteur et côté jardin, des mises en scène de femmes d’aujourd’hui, elles montrent qu’entre 30 ans et 70 ans, « le pardon reste une possibilité vibrante d’émotion qui trouvera son chemin en son temps. »
Le dossier se termine par la célébration sur le pardon. « Le don et le par/don sont au cœur du paradigme chrétien. La présence de Jésus parmi nous constitue le don par excellence; Lui qui est venu donner sa vie pour qu’il y ait pardon. » Le don et le pardon permettent un cheminement en vue de construire une ecclésia de disciples égales, de communautés réconciliées avec elles-mêmes et avec Dieue. Vous retrouverez également quelques réécritures de versets chez Matthieu, Luc, les Éphésiens et les Colossiens. Au moment du partage du pain et du vin, le chant des sœurs Marleau nous accompagnait.
Enfin, dans notre chronique Lettres et sons deux recensions vous sont présentées : la première présente L’Âme du monde de Frédéric Lenoir qui met en scène sept sages d’univers radicalement différents. Je vous laisse le plaisir de lire les mots et le message de ce livre qui donne espoir selon Christine Lemaire. Quant à la deuxième recension, je l’ai voulu comme une invitation au tourisme culturel et religieux dans les cimetières du Québec. Ce Guide fait un survol tant des cimetières catholiques, que protestants, juifs, amérindiens, et de guerre. Vous y découvrirez des illustrations pour plus de 400 des 1800 cimetières et des notices sur une vingtaine de sujets allant des pratiques en cours en Nouvelle-France, chez les Amérindiens, les Juifs, et sur les matériaux qui, tout comme la représentation, ont évolué dans le temps.
Bonne lecture!
Monique Hamelin
Pour le comité de rédaction
- PREJEAN, Helen. La dernière marche. Traduit par Viviane Mikhalkov, Éditions Pocket, 1996.