« S’ACCEPTER COMME FEMME, SE REAPPROPRIER SON CORPS »
Tel était le sujet de discussion sur lequel notre groupe de réflexion a commencé à échanger lors de sa rencontre de janvier .
Identification de nos oppressions
Il est sont difficile de s’accepter comme femme, de vivre en parfaite harmonie avec son corps.
Pour nous femmes de quarante ans, ne nous est-il pas arrivé, lorsque nous étions jeunes, de nous dire: 11j 1aimerais être un garçon ». Pourquoi certaines ressentaient-elles ce désir caché? Parce qu’elles vivaient certaines défenses, certaines oppressions comme par exemple, 1’accessibilité aux sports; la petite fille ne semblait pas encouragée à occuper ses loisirs de la façon dont elle le désirait. Comme le disait l’une d’entre nous: » Plus jeune, j’aurais aimé être un garçon à cause des avantages et entre autres une plus grande facilité à s’adonner à certains sports ».
Notre corps, de par sa physiologie, nous fait obstacle, nous pose des barrières. Nous avons toutes vécu depuis notre adolescence le phénomène des menstruations. 11 Les menstruations m’empêchent de faire ce que je veux, c’est une barrière ». Ces menstruations affectent tout notre comportement: nous sommes moins à l’aise pour vaquer à nos occupations habituelles, nous ressentons des malaises physiques, nous ne pouvons jouir de certaines activités sportives, nous sommes bien souvent inquiètes de leur régularité et nous nous posons des questions sur la raison de leur retard, etc …
Et c’est à nous les femmes que revient la responsabilité d’une future naissance, de planifier la venue des enfants. Et pourtant, nous n’avons pas le droit de parole quand l’Eglise se prononce sur la question morale de la limitation des naissances …Sur cette question, les hommes décident mais les femmes en portent la responsabilité, le « tiraillement » …que de frustrations … Et si une grosses se survient. c’est nous qui en assumons les risques. C’est notre corps qui porte les enfants, c’est nous qui mettons au monde un nouveau fils ou une nouvelle fille. C’est un rôle merveilleux que celui de donner la vie. Mais la maternité n’est pas que joie et émerveillement. C’est aussi un ensemble de sentiments d’anxiété, de crainte, de peur de 1’imprévu. 11 Et ces risques sont difficilement acceptable& ‘ Les risques de la grossesse pour l’enfant, pour nous. Et on nous accuse d’être « dénaturé es » quand on ose le dire. Les hommes n’ont pas à avoir peur d’enfanter dans la douleur .. Il faudrait aussi ajouter toutes les limites sur le plan des activités qu’occasionne une grossesse ..•
Et lorsque l’enfant est là, nous devenons mère, éducatrice, infirmière, etc .. et surtout il ne nous faut pas oublier de demeurer épouse, « ménagère », hôtesse, belle, intelligente, etc .. Et que devient le « moi » dans toute cette série de rôles, de tâches?. Que devient la carrière que nous avions choisie? C’est tout le débat intérieur qui se d’éclanche …Nous sommes souvent seules pour trancher la question, déchirées devant le choix à faire entre la famille et/ ou la carrière .. « Il faut une grande volonté pour mener de front la carrière et la vie au foyer …l’image de la famille traditionnelle est encore trop stéréotypée . pendant que la mère travaille, le père, assis dans son fauteuil, se laisse cajoler par les enfants ou lit son journal! .. Et que dire de tous ces exa mens gynécologiques, des frustrations ressenties dans un bureau de gynécologue, du manque d’incompréhension …Nous défilons comme des numéros et que d’investigations sur notre corps sans se préoccuper de nos sentiments ..Il me semble que je perdais mon identité, que j’étais une autre …le fait d’être mariée limite emplois et carrières .. l’embauche pour un travail à temps partiel est difficile. »
Et la sexualité? Sur ce thème nous vivons certaines oppressions, séquelles de l’éducation que nous avons reçue. On a parlé durant longtemps du rote passif que devait jouer la femme lors des relations sexuelles … Le corps de la femme était fait pour procréer mais pas pour jouir … Le rôle actif de l’homme, de son pouvoir sur le corps de l’autre …il s’appropriait le corps de la femme … Le péché en ce qui touche le désir charnel. ..La pudeur, se garder vierge pour son époux .. « Me réapproprier mon corps, apprendre à m’exprimer avec tout mon corps, vivre ma sexualité, ne plus être gênée face à mon corps. »
Voilà un bref compte rendu des réflexions que nous a amené à faire l’identification des oppressions ressenties du fait d’être une femme, aux difficultés souvent rencontrées de s’accepter comme telle. Cette remise en question nous aide bien à cerner le thème de l’année choisi par le collectif L’Autre Parole » La femme et son corps ».
Dans un deuxième temps, le groupe a voulu cheminer sur un plan plus positif à savoir, trouver dans la tradition chrétienne des éléments gui viennent répondre à nos oppressions; à nos questions. Nous sommes conscientes d’être limitées dans cette recherche car nous ne sommes pas théologiennes. Mais notre connaissance même restreinte de l’Ecriture nous a permis de conclure ainsi: la lecture de la Bible nous apprend que des prophétesses telles que Débora, Anne et certaines autres jouissent d’un certain pouvoir dans la Tradition. Elles étaient consultées et l’on tenait compte de leur sagesse clairvoyante. Jésus s’est entouré de femmes. Il n’a pas condamné la femme à cause de son corps; pensons à Marie-Madeleine, à la femme adultère, à la Samaritaine. Il aimait prendre des moments de repos chez Lazare en compagnie de Marthe et Marie. Ressuscité, c’est aux femmes qu’il se révèle d’abord; c’est à elle qu’il demande de transmettre le premier message de sa résurrection. Si Jésus n’a pas eu de femmes au sein de l’équipe des douze c’est qu’il faut se placer dans le contexte culturel du temps. S’il avait fondé son Eglise aujourd’hui, nous n’avons pas peur d’avancer que le pouvoir aurait appartenu également aux hommes et aux femmes. Nous sommes convaincues qu’étant venu libérer l’humanité, le Christ homme considère la femme et l’homme égaux aux yeux de Dieu et égaux au sein de l’humanité tout entière .. Et le peuple de 1’Esprit est aussi présent dans l’âme de la femme . et notre corps en est l’habitat . Pourquoi donc toutes ces lois qui reflètent le sexisme? …
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Rimouski.
Sophie Lemieux-Guy
pour le groupe des sept