SPIRITUALITÉ DES FEMMES DANS LA QUARANTAINE
Pierrette Daviau
Avoir quarante ans est souvent considéré comme un temps fort et significatif dans la vie des humains et plus spécialement chez les femmes. Ce temps, souvent appelé mitan de la vie, crise existentielle, recherche de son identité, âge mûr, etc. correspond souvent à un besoin de changement, à une insatisfaction de vie 1. Chez certaines femmes, cette période s’accompagne dune réelle saturation quant aux divers rôles joués dans la famille, au travail et dans la société. Pour d’autres, ce temps se présente comme une opportunité de vivre autre chose, de réaliser leurs rêves de jeunesse, de se libérer de diverses contraintes professionnelles ou familiales. On assiste alors à une réflexion sur leurs projets de vie, sur leurs options professionnelles, sur de nouvelles perspectives d’avenir, sur un « nouveau départ » désiré et parfois réalisé. À cet âge où les choix professionnels, familiaux et sentimentaux diminuent progressivement et où les ressources physiques s’amenuisent, on tente de réaliser un bilan de son contexte de vie, des anciens rôles joués, de ceux envisagés et de l’énergie que cela devrait engager pour le temps qu’il reste à vivre. De nombreuses questions peuvent se poser : dois-je continuer le style de vie que je mène ? Qu’est-ce que je désire pour le reste de ma vie ? Qu’est-ce que je pourrais changer ? Qu’elle est ma réelle identité ? etc.
Plusieurs études sur les changements physiques, psychologiques et sociétaux liés à cette période de vie, à l’âge de la ménopause ou de la préménopause ont été réalisées, la plupart en anglais, mais certaines en France et aussi au Québec 2. Par contre que se passe-t-il dans la vie spirituelle des femmes de la quarantaine ? Qu’en disent certaines recherches ou certains livres ? Peu de ces recherches se sont penchées spécifiquement sur la spiritualité des femmes au mitan de la vie, mais ont plutôt présenté les caractéristiques générales de la spiritualité de cette période 3.
Cet article tentera de dégager comment les incidences psychosociales des femmes de la quarantaine influencent leurs diverses manifestations spirituelles. Quelles sont les tendances que l’on peut discerner ? Et comment certains passages des Écritures pourraient-ils être éclairants pour accompagner la spiritualité de cette étape cruciale de la vie spirituelle des femmes.
Évènements marquants
Dans la quarantaine, diverses situations sont susceptibles d’éveiller des prises de conscience pour provoquer des modifications importantes sur le plan des rôles et des responsabilités des femmes et entraîner des remises en question profondes. Sans être exhaustive, on peut noter le départ des enfants, la maladie de l’épouse ou du conjoint, le décès des parents ou la perte d’autonomie de personnes proches, des accidents des membres de la famille, la prise en charge de parents malades, le phénomène Tanguy. On pourrait en énumérer d’autres : nouveaux membres de la famille, veuvage, retraite personnelle ou du conjoint, perte d’emploi, précarité du marché du travail, déménagement, faillite, prise en charge de petits-enfants, etc.4. Après avoir joué plusieurs rôles, assumé diverses responsabilités et s’être efforcées de satisfaire les besoins des proches, il n’est pas facile de se retrouver, de savoir qui on est exactement ou qui on aimerait être. Les femmes se sentent souvent peu écoutées de leur entourage dans l’expression de leur vécu et négligent de s’arrêter véritablement. Celles qui se permettent une démarche de réflexion ou un bilan de vie sont portées à redéfinir leurs besoins, leurs attentes, leurs désirs, sans toutefois trouver nécessairement des façons de les accomplir.
Conscientes du temps qui passe, de leurs limites physiques, du déclin de leurs capacités, des femmes dans la quarantaine vivent un sentiment d’urgence pour mettre en œuvre leurs projets, leurs rêves laissés derrière elles. L’urgence de s’occuper maintenant d’elles, de quitter des rôles qui ne leur conviennent plus, une profession acceptée sans conviction par un besoin pécuniaire de la vie familiale les tenaillent. Pendant des années, elles ont cumulé vie de famille, vie professionnelle, vie de conjointe en faisant concessions et compromis qui peuvent être source de frustrations et parfois même de colère. Au plan affectif, elles commencent à douter de leurs charmes tout en voulant retrouver l’envie de séduire pour se rassurer ou tout simplement pour se sentir à nouveau désirée. Cela peut engendrer chez quelques-unes des aventures passagères ou, pour d’autres, mener à une rupture franche et définitive avec le conjoint et chercher un autre homme qui leur procurera plus de plaisir et d’attention. Alors que le dialogue et l’écoute pourraient remédier à cette crise, il arrive que les hommes considèrent à la légère leurs revendications et n’aident pas leur femme à intégrer ces passages difficiles pour aller vers un épanouissement du couple en présence d’une nouvelle réalité.
Cette étape de la vie — incontournable pour les hommes comme pour les femmes — est donc marquée par une crise psychologique et spirituelle où la reconnaissance de leurs forces comme de leurs limites permet d’expérimenter finitude en même temps que possibilité de croissance. S’il est vrai que la manière d’aborder ces années de doute — voire de tempête — peut entraîner des décisions irrémédiables et des cassures familiales dramatiques, il est aussi possible que cela conduise à une renaissance et devienne un tremplin vers un plus-être, vers un épanouissement et une liberté mieux assumée. Cela exige évidemment de ne pas fuir les situations pénibles, de prendre du temps, de se faire aider, de ne pas éluder cette crise. Le succès personnel et psychosocial sera assuré quand la personne acceptera de revoir ses priorités, de passer des symptômes aux causes, de la surface à la profondeur, de découvrir le sens de ce qui la passionne, la motive et la fait vivre. Alors cette crise existentielle, cette période de doute et d’insatisfaction devient occasion de reconstruction intérieure, de rencontre avec soi-même, avec les autres, avec le sacré.
À la suite d’événements difficiles vécus au cours de la quarantaine, une majorité de femmes s’est retrouvée engagée dans un processus de recentrement qui les a conduites à faire de nouveaux apprentissages. Les acquis qui ont découlé de ces apprentissages sont nombreux : mettre des limites, s’affirmer, redéfinir des valeurs, intégrer le passé, réaliser des projets laissés en suspend, etc. […] Ce n’est plus par devoir ou par obligation qu’elles veulent agir. Leurs actions se veulent une réponse à un appel intérieur, à une aspiration, à un désir ; en somme, ces actions sont déterminées par une motivation interne5.
Une spiritualité en marge ?
Les expériences vécues au cours de la quarantaine semblent se polariser autour de deux pôles, opposés en même temps que complémentaires : d’un côté, le pôle de la nécessité. Il est celui des contraintes, des remises en question, des limites et des fragilités. D’un autre côté, il y a le pôle de la possibilité. Ce pôle est celui de la liberté, de la responsabilité et de la détermination de soi. Le premier pôle exprime la finitude inhérente à toute vie humaine, le second, des possibilités qui restent offertes à l’intérieur de cette finitude. Réévaluer sa vie, développer une nouvelle définition de soi, se permettre une démarche d’introspection et d’analyse de son vécu orientent vers un nouveau sens de la vie, une redéfinition des valeurs, une conscience plus grande de l’importance de l’intériorité, de la spiritualité. Les femmes interviewées pratiquent pour la plupart une « spiritualité hors du temple » :
Elles affirment ne plus trouver de quoi nourrir leur spiritualité dans une institution qui dit non aux phénomènes de la modernité et qui condamne, très souvent sans raison, ses pratiques morales, sexuelles, bioéthiques et conjugales. Elles sont davantage portées à vivre leur spiritualité dans le relationnel et moins dans le religieux, en tout cas loin des religions institutionnalisées ; désirent-elles en contester les structures par trop rigides en s’intériorisant davantage ? […] Si un bon nombre critique vertement cette institution d’autres, sans s’en prendre directement à cette dernière, disent simplement l’avoir abandonnée, ne plus pratiquer6.
La spiritualité des femmes du mitan se présente donc comme une réalité pour le moins complexe. C’est une spiritualité qui, actuellement, se définit en marge de l’héritage religieux, d’un héritage qui se trouve contesté en raison de son dogmatisme et de son autoritarisme. Dans la société québécoise, on est loin de croire que la religion/les religions peuvent contribuer positivement à la croissance et au développement spirituel. Plusieurs femmes interviewées lors de notre recherche affirment que la religion ne contribue pas à l’articulation et à l’appropriation de leur spiritualité7. On assiste au rejet d’une religion de peur, de contraintes, de contrôle, de pouvoir qui insiste sur le péché, surtout sur ceux attribués à la sexualité des femmes.
Or, la présence au corps est également une particularité des spiritualités féministes. Le courant de spiritualité hérité du passé a insisté et insiste encore sur l’oubli de soi et l’abnégation. Il a pu conduire à exalter le salut individuel dans une fuite des réalités quotidiennes ou du moins dans une méfiance à leur encontre. Longtemps dénigré et réduit à la sexualité par les autorités ecclésiales, le corps est perçu par les femmes non comme une entité close sur elle-même, mais comme une configuration éclatée toujours ouverte pour l’accueil, le don et la tendresse. Les féministes visent à faire tomber les formes de coercition, d’oppression et d’appropriation qui existent encore à propos du corps et en particulier du corps féminin8.
On entend que les femmes désirent davantage une spiritualité qui les oriente vers un pèlerinage, une marche, un cheminement, une quête de valeurs et de sens. Non pas errance, mais itinérance. Il s’agit de marcher dans ce qui est déjà là ; de chercher une nouvelle façon d’être dans son espace existentiel, de marcher à l’intérieur des limites de sa quotidienneté ; de prospecter son champ secret pour y découvrir le trésor déjà enfoui. Par-delà les remises en question et les crises, elles souhaiteraient une spiritualité vécue comme une force dynamisante, donatrice de sens. Une spiritualité orientée vers l’action, source de renforcement et de communion. Pour certaines, la spiritualité représente un aboutissement alors que pour d’autres, qui vivent un moment de crise ou de gestation spirituelle, elle est de l’ordre de l’inconnu ou d’une démarche à l’aveugle. La vie spirituelle peut se nourrir à plusieurs sources : méditation personnelle et communautaire, lectures, partages, sans oublier la Nature qui occupe une place privilégiée comme moyen d’expression chez plusieurs d’entre elles.
Écospiritualité féministe
Pour les femmes rencontrées, leur spiritualité se manifeste dans leurs liens avec la Terre-Mère et tout l’Univers. Elle met l’accent sur les relations avec soi, les autres, et le Cosmos. La contemplation de la Nature est en effet un lieu par excellence où exprimer la gratitude, apprécier la beauté du monde, nourrir l’intériorité, vivre l’essentiel, recevoir des réponses, vivre l’unité, etc. Les croyances cosmiques, celles concernant le moi sublimé ou encore le culte des déesses9 se retrouvent également dans certains groupes féministes. Ces approches semblent emprunter à plus d’une tradition. Souvent orientées vers le sacré, elles tentent de revisiter les religions traditionnelles en s’inspirant des spiritualités autochtones, alternatives, asiatiques10. Ces dernières exercent un pouvoir de fascination réel autant chez les jeunes que chez un grand nombre de femmes du mitan. La méditation de pleine conscience, par exemple, est pratiquée par beaucoup de femmes de cet âge. On le sait, cette pratique augmente la capacité d’attention et de concentration, améliore la confiance en soi et la communication interpersonnelle, etc11.
Nous constatons également que l’écospiritualité féministe rejoint bon nombre de femmes préoccupées par la dégradation de l’Univers, mais surtout par sa sauvegarde. Elles emploient des métaphores telles que « retisser le monde », « guérir les blessures », reconnecter et interconnecter la « toile ». Penser en termes de spiritualité écologique, c’est aussi comprendre la spiritualité de façon évolutive, a déjà dit Ursula King qui ajoute : « L’écologie spirituelle a pour premier objet la transformation des valeurs qui entraînera une action pour sauver la planète. Quelle que soit la religion ou la forme de spiritualité qu’on pratique, on peut trouver un lien à la terre et au travail politique à accomplir pour corriger notre façon de gérer les ressources naturelles de la planète »12. Cette spiritualité invite à un changement de conscience et de cœur et favorise une vision holistique d’interdépendance avec les autres comme avec la Terre :
La spiritualité écoféministe intervient pour indiquer que nous ne vivons pas dans un Univers où il y a, d’un côté, les êtres humains et de l’autre côté, la Terre et les écosystèmes, mais que nous sommes interdépendants, que notre vie dépend les uns des autres, les unes des autres. La clé de cette spiritualité, c’est ainsi de ne plus voir la Terre comme un objet, mais de voir l’être humain comme faisant partie du corps de la Terre. Cette spiritualité souligne que la Terre est vivante et qu’elle peut mourir plus tôt par nos propres œuvres de destruction, d’introduction d’engrais, de saletés, de pollutions13.
Comme chez les femmes de cette période cruciale de vie, la transformation de la Terre se fait dans la souffrance comme dans l’attente, dans l’impatience de l’espérance d’un monde nouveau14. Selon la manière dont nous l’habitons et la respectons, la Terre peut devenir ou non, lieu de communion et de rencontre avec le divin. Les contacts avec la nature deviennent lieu de contemplation, espace d’émerveillement, occasion de rencontre avec le Divin15.
Inspirations bibliques
Ce qui est évident, c’est que les multiples formes d’expressions spirituelles des femmes partent de leurs expériences contrairement aux expressions des diverses religions monothéistes qui s’inspirent quasi exclusivement des images et des titres masculins. Pourtant le Dieu d’Israël n’est jamais défini en termes sexués, mais se nomme YHWH, terme ni masculin ni féminin : « Je suis » et Osée lui fera dire : « Je suis Dieu, et non pas mâle » (Os 11,9). La Bible nous présente également une figure féminine de YHWH16, celle de la Sagesse, la Sophia, qui apparaît surtout dans les livres des Proverbes, du Siracide et de la Sagesse. La Sophia se présente comme fille, comme fiancée, comme mère, comme épouse, comme créatrice. Mais également comme inspiratrice pour des moments de réflexion dont les femmes de la quarantaine sentent le besoin : « Moi, la Sagesse, j’ai pour demeure le discernement, Et je possède la science de la réflexion. Le conseil et le succès m’appartiennent ; Je suis l’intelligence, la force est à moi » (Pr 8, 12 et 14).
Un autre livre de la Bible qui correspond à la démarche de la quarantaine est sans contredit celui de l’Exode qui raconte la longue marche dans le désert des Hébreux en présence de Moïse, de sa sœur Myriam et de son frère Aaron17. Que peut nous apprendre cette expérience de l’exode ? Ne peut-on y trouver une signification spirituelle, une marche de soi, de tout un Peuple vers sa libération ? Il nous apparaît certaines ressemblances avec la période du mitan où les femmes entreprennent un cheminement vers plus de liberté, plus de reconnaissance de leur identité. Et comme dans l’Exode des Hébreux, cela ne se fait pas sans souffrance, sans peur, sans ruptures. Mais vers un renouveau, vers une vie autre et encore inconnue. Cheminer ainsi nécessite de consentir à une expérience intérieure, à un dialogue avec soi et avec les autres. Une reconstruction au quotidien de relations à approfondir se met en place. Dans cette longue traversée, Israël apprend à être différent des autres peuples, à se centrer sur le déplacement qu’il vit, à devenir de plus en plus en alliance avec YHWH. Au-delà du récit de la libération des Hébreux, ce livre rejoint les aspirations des femmes du mitan de la vie à plus de liberté, à un nouvel affranchissement, à des perspectives d’avenir meilleur.
La symbolique du chiffre 40 dans la Bible représente souvent le remplacement d’une période par une autre ou encore les années qui constituent la durée d’une génération. Il signifie un temps d’épreuves, de dépouillement, de mise à nu, (Mt 4,2 – Jésus au désert), mais également un moment d’apaisement, un constat de la fin de l’épreuve (Gen 7,4 – Noé sort de l’Arche après 40 jours). C’est aussi la reconnaissance de l’accomplissement, de la maturité (Act 1,3 – l’Ascension de Jésus), un temps de réflexion et d’intercession : « Moïse entra dans la nuée et monta sur la montagne pour prier, 40 jours et 40 nuits » (Ex 24,18). Une phrase du Deutéronome peut nous rappeler l’attitude des femmes du mitan se recueillant pour estimer les moments parcourus dans leur vie : « Souviens-toi de tout le chemin que Yahvé ton Dieu t’a fait faire pendant quarante ans dans le désert, afin de t’éprouver et de connaître le fond de ton cœur » (Dt 8,2)18. Se souvenir bien sûr des situations d’oppression, mais aussi goûter les événements de libération qui remettent en route et suscitent l’espoir.
Il y aurait aussi la fréquentation des femmes de l’Ancien Testament. Pensons à Ève, première femme de l’humanité, première « vis-à-vis » de l’homme, mère de tous les vivants. À toutes les femmes autour de Moïse durant l’Exode. N’oublions pas Déborah, Yaël, Ruth et Noémie, Esther qui ont eu des comportements exceptionnels19. Et celles du Nouveau Testament, des Évangiles en particulier. Celle qui retient notre attention à cause du cheminement remarquable est la Samaritaine (Jn 4, 1-30) à qui Jésus fait cette demande surprenante : « Donne-moi à boire ». Ce long dialogue entre deux personnages n’est-il pas un exemple de spiritualité au cœur d’une vie quotidienne bouleversée, condamnée ? Un modèle de spiritualité au cœur de la matérialité ? Cette femme de Samarie apparaît comme un prototype d’écoute, d’intelligence, de contribution active au développement de sa conversion. On est en présence d’une spiritualité incarnée dans son vécu.
Aujourd’hui encore, le message de la Samaritaine résonne fortement, surtout dans les sociétés modernes. Il dit l’éternelle quête de sens du sujet humain, malgré le bien-être, malgré la sécurité matérielle qui accompagne l’existence, malgré le discrédit de la parole institutionnelle des religions. S’il est plus courant aujourd’hui de dire que l’on n’attend plus rien de Dieu parce que les sociétés s’emploient à assurer le bien-être des peuples, la quête du sujet, sa soif de sens, de reconnaissance de sa dimension spirituelle demeure forte. L’exemple de la Samaritaine est précieux […] pour en définir les modalités20.
Sans conclure
Ainsi, la spiritualité des femmes du mitan de la vie n’est ni un ensemble de vérités ni un assortiment de rites ou d’engagements dans une communauté ou auprès des défavorisés. C’est un mélange de formes multiples par lesquelles leur intériorité est nourrie et leur personne davantage épanouie. Leur démarche spirituelle leur permet d’être en contact avec leur être profond, avec les forces primordiales de l’Univers, avec leur énergie vivante qui pénètre et envahit tout. D’une manière ou de l’autre, leur cheminement conduit dans le monde de la compassion, de la lutte contre les injustices et vers la promotion de la paix. Leur travail de remise en question, leurs diverses ruptures avec le passé personnel ou institutionnel les rendent souvent davantage capables de se connecter à elles-mêmes, les unes aux autres de manière égalitaire et participative. Dans plusieurs cas, leur cheminement les conduit à plus de solidarité avec les marginaux, leur souffrance personnelle ayant, sans contredit, produit plus de sensibilité et de disponibilité. On ne peut que souhaiter que leur vie spirituelle s’inspire toujours plus de l’imagination, de la créativité, de l’art et moins de la logique.
Et on peut bien rêver : pourquoi le développement de ces spiritualités du quotidien, des relations avec soi, les autres et la Nature ne deviendrait-il pas un nouveau « levain dans la pâte » ? Une semence de renouvèlement dans un Québec en recherche de sens et souvent sans balises ni guides spirituels ? « Ne savez-vous pas qu’un peu de levain fait lever toute la pâte ? Purifiez-vous du vieux levain pour être une pâte nouvelle » (1Cor, 5,6).