No. 105 – L’espérance aux multiples visages

Liminaire

L’espérance, ce sentiment si puissant et si fragile a toujours fait « marcher le monde ». Elle ne connaît aucune limite. Entrée en scène dès l’apparition de la vie sur terre, elle se manifeste à travers de multiples visages. Nous pouvons en suivre la trace partout dans la nature, en toute saison, mais particulièrement au début du printemps où l’effervescence de la vie connaît son élan maximum : la montée de la sève dans les arbres en attente de verdure, le réveil des crocus et des tulipes sur les gazons, les nids d’oiseaux réanimés, le soleil se hâtant de détrôner la nuit pour s’accaparer l’espace immensément bleu d’un ciel sans nuage….

Ces changements visibles à nos yeux ne sont qu’un pâle reflet de l’influence qu’exerce l’espérance à l’intime des coeurs par le dynamisme qu’elle suscite et les transformations incroyables qu’elle opère dans l’ensemble de l’univers.

Considérée parfois comme « une femme qui accouche dans la douleur et l’amour», l’espérance se révèle à partir des contextes d’où elle est issue. Souffle ardent venue de très loin, elle apporte à l’humanité la force qui la fait exister et permet à la vie de produire toute sa richesse. Ne s’imposant jamais à qui que ce soit, vous la trouvez partout où surgit la vie qu’elle féconde.

Vous la trouverez active au coeur « des héroïnes bibliques qui ont marqué leur époque telles que Judith et la femme cananéenne » ainsi que dans la vie de «certaines femmes d’aujourd’hui dont l’oeuvre portée jusqu’à l’héroïsme a été honorée d’un prix Nobel ».

Elle se manifeste aussi « à travers les arts » avec autant d’aisance que « dans les petits gestes du quotidien » dont la puissance de renouveau n’a d’égal que la discrétion dont elle s’entoure. Si ces petits gestes ne semblent pas changer le monde, ils contribuent sûrement à l’humaniser. Croire en la puissance de ces petits gestes, quel plus bel hommage peut-on rendre à l’espérance ? Qu’elle chemine dans l’anonymat ou qu’elle brille au tableau de l’excellence, l’espérance n’en est pas moins attentive aux appels de quiconque s’engage sur la voie du dépassement « à travers la trajectoire de sa vie » dont le sens se trouve d’abord gravé dans sa propre histoire. Le ressourcement spirituel n’a pas d’égal pour faire le plein d’espérance et d’énergie. C’est comme si d’énormes ressources latentes, refoulées, bafouées ou ignorées étaient soudain ramenées à la surface de l’être.

L’espérance est une vertu qui se transmet « en la vivant ». Elle se reflète parfois de façon si tangible dans le sourire des enfants, leurs jeux , leur croissance, qu’on a l’impression « de la toucher du doigt ». « Servir de relais à l’espérance » n’est-ce pas aller puiser dans ses forces vives et dans ses ressources intérieures ce qui donne sens à la vie ? Cela peut exiger « un effort ardu et soutenu», car l’espérance, comme la foi, se vit dans la condition humaine. Et comme il y a de tout dans la vie, l’espérance est toujours à son poste.

« Face à tant de détresses humaines insupportables qui ne cessent d’envahir nos écrans » de jour en jour, et de façon de plus en plus agressive, notre monde a besoin plus que jamais d’espérance. Mais l’espérance ne contraint personne. À nous de jouer. Si la vie est parfaite jusque dans les épreuves qu’elle nous réserve… sa beauté c’est de ne jamais nous laisser tranquilles et de nous rappeler qu’il n’y a rien de durable ici-bas, sinon l’espérance.

En ce début du 21e siècle, il paraît urgent de transmettre, sous des représentations nouvelles, le message d’espérance venant de notre tradition, car une espérance sans limite se tient toujours à l’horizon du destin humain.

La certitude d’un avenir nous ancre au coeur du présent, car l’espérance n’est pas rêveuse, elle ne regrette pas le passé, elle ne bouscule pas l’avenir, elle accueille dans une vaste respiration l’avenir qui avance…

(Les Sillons)
Yvette Laprise
Comité de rédaction